“Unbelievable”, une minisérie implacable sur la double peine des femmes violées (2025)

L’histoire vraie de Marie, une jeune Américaine, qui après avoir subi un viol est accusée de faux témoignage au terme d’une enquête bâclée. Un calvaire de huit épisodes qui fustigent le déni des institutions face aux violences faites aux femmes.

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Lorsque la police arrive chez elle au petit matin, Marie (Kaitlyn Dever, remarquable) est en état de choc et ses poignets couverts d’ecchymoses. La jeune femme de 18 ans a été violée par un homme cagoulé en pleine nuit, dans son logement pour jeune adulte en difficulté. Dans l’appartement, les agents de police trouvent peu de traces ADN, et aucun signe d’effraction. On croit d’abord qu’Unbelievableest une enquête criminelle inextricable. Mais la mini-série prend rapidement une toute autre ampleur. En vingt-quatre heures, Marie devra raconter son agression en détails cinq fois et subir une batterie d’examens médicaux pénibles et intimidants. Sa solitude et notre malaise ne cessent de grandir, à mesure que le doute s’installe dans l’esprit de ses deux ex-mères d’accueil Judith et Colleen, pourtant bienveillantes. Marie leur semble trop stoïque, pas vraiment bouleversée. N’aurait-elle pas inventé son agression pour attirer l’attention?

Captivant polar,Unbelievableest l’adaptation d’un article journalistique déjà passionnant, «An unbelievable story of rape», publié en 2015 par les sites d’investigation Propublica.org et TheMarshallProject.org, et récompensé par un prix Pulitzer en 2016 (on vous conseille de ne le lire qu’après avoir vu la série, histoire de ne pas gâcher le plaisir de l’intrigue). Et Hollywood ne s’y est pas trompé: les créateurs de la série, Susannah Grant, Michael Chabon et Ayelet Waldman, scénaristes et auteurs pour le cinéma, y ont vu une formidable matière de scénario. Ils ont eu la bonne idée de conserver la structure haletante de l’article, récit croisé de deux vraies enquêtes policières menées aux Etats-Unis entre 2008 et 2011. Celle sur le viol de Marie, à Lynnwood, près de Seattle, aussitôt accusée d’avoir tout inventé. Et celle menée dans le Colorado, trois ans plus tard et à 2000 kilomètres de là, par un duo d’inspectrices unies pour traquer sans relâche un violeur en série. Jusqu’à ce que les deux affaires se rejoignent…

La violence ordinaire infligée aux victimes

Unbelievableromance un peu la partie Colorado de l’enquête. La force de la fiction repose pour beaucoup sur l’écriture des personnages de Karen Duvall et Grace Rasmussen, et leur impeccable incarnation par Merritt Wever et Toni Collette. Karen Duvall, mère de famille croyante, est une enquêtrice encore jeune, empathique et hantée par ses affaires. Mine pensive et inquiète, Merritt Wever lui donne une folle intensité. Grace Rasmussen, plus expérimentée, brute de décoffrage, personnifie un tout autre type de détermination – Toni Collette est formidable en flic revêche et sarcastique. Au fil des huit épisodes, son personnage se fait bouillonnant, de plus en plus révolté par la violence et l’injustice faites aux femmes. Le binôme Duvall-Rasmussen doit d’abord s’apprivoiser, avant de faire corps: les scénaristes ont étoffé avec finesse leur combat, faisant d’Unbelievableune dénonciation poignante des violences infligées par la société et les institutions censées les protéger aux victimes de violences sexuelles, mais aussi conjugales…